Romantisme N°190 (4/2020)
Pour acheter ce numéro, contactez-nous
Recevez les numéros de l'année en cours et accédez à l'intégralité des articles en ligne.
Dans la catégorie éminemment flottante du poème en prose tel qu’il se déploie au xixe siècle, les « Fantaisies en prose » de Charles Cros, rassemblées dans la dernière section du Coffret de santal en 1879, se donnent à lire comme une variation expérimentale tout aussi audacieuse que Les Illuminations de Rimbaud ou les Notes parisiennes de Germain Nouveau. Le poète concentre dans ce noyau sombre innovations formelles et vertige métaphysique qui redonnent tout son sens à la notion de fantaisie, aux antipodes d’une forme de légèreté et de désinvolture à laquelle la critique s’est souvent contentée de la réduire. En ce sens, dans le dernier quart du siècle, elle s’obscurcit graduellement et se confond momentanément avec une certaine négativité et la hantise de l’échec, littéraire comme existentiel. C’est cette précarité habilement mise en scène que nous entendons questionner dans cet article, tout en nous efforçant de dégager la manière spécifique de Cros.
Within the notoriously unstable category of the prose poem during the 19th century, Charles Cros “Fantaisies en prose” or “Prose Fantasies” as gathered in the last section of the 1879 Coffret de santal are as experimental a read as daring as Rimbaud’s Illuminations or Germain Nouveau’s Notes parisiennes. His poetry’s dark core condenses formal innovation and metaphysical vertigo in a way that hands back to the notion of fantasy its full meaning, antithetical to the idea of a form of nonchalance and lightness to which critical analysis has often reduced it. In this sense, during the last quarter of the century, fantasy gradually darkens and can come to be momentarily identified with a certain kind of negativity and anxiety of failure, both literary and existential. This paper will take a close look at this carefully staged precariousness, and at the same time bring to loight the specificity of Cros’work and style.