Revue d'histoire des sciences - Tome 62 (2/2009)
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En 1982, d’éminents biologistes et paléontologistes se réunirent à Dijon pour débattre des mécanismes et de modes de la spéciation, et plus particulièrement du nouveau modèle des équilibres ponctués proposé dix ans plus tôt par Stephen Jay Gould et Niles Eldredge. Les paléontologues français montrèrent l’ambiguïté du nouveau modèle qui n’était ni simplement équivalent au modèle de spéciation péripatrique de Mayr ni entièrement nouveau. Ils mirent aussi en doute sa généralité. L’interprétation majoritaire des enchaînements fossiles resta donc traditionnelle mais pluraliste. Le débat apporte d’importants enseignements au plan épistémologique, tels que l’existence de phénomènes de mode dans la recherche scientifique, de cycles théoriques dans l’explication de l’aporie continuité/discontinuité et de l’aspect relativement indépendant des différents éléments d’une théorie, lesquels se comportent en modules pouvant se recombiner.
In 1982, eminent biologists and paleontologists met in Dijon to discuss the mechanisms and modes of speciation, in particular the new model of punctuated equilibria offered by Stephen Jay Gould and Niles Eldredge ten years earlier. The French paleontologists showed the ambiguity of this theory, which was neither simply equivalent to Mayr’s peripatric model, nor entirely new. They also called into question its generality. The prevailing interpretation of fossil continuity remained therefore traditional but pluralist. An analysis of this debate brings out important epistemological elements, such as the existence of fashions in scientific research, of theoretical cycles in the explanation of the continuity/discontinuity aporia, and of the relative independence of the different elements of a theory, which behave like modules that can be combined anew.