Revue d'histoire des sciences - Tome 63 (2/2010)
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L’électroencéphalogramme (EEG), invention du psychiatre allemand Hans Berger en 1924, gagne les laboratoires de neurophysiologie et différents contextes cliniques au milieu des années 1930. Si en Suisse, quelques physiologistes sceptiques et psychiatres enthousiastes ouvrent la voie, c’est dans l’après-guerre qu’une épileptologie naissante participe à un mouvement général de domestication d’une innovation technologique et épistémologique qui suscite d’innombrables espoirs et travaux à l’intersection de la physiologie, de la neurologie et de la psychiatrie. Un réseau informel se met en place, caractérisé par des cultures cliniques, scientifiques et institutionnelles locales. L’EEG participe également à la lisibilité d’entités cliniques qu’il ne capte pas sans les transformer, à l’image de l’épilepsie. Quelques tentatives de sonder des maladies et des sujets psychiatriques à l’aide de l’EEG sont explorées en tant que rapports négociés entre des observations cliniques, des manifestations subjectives et des inscriptions d’une activité électrique cérébrale spontanée ou provoquée. Ces tentatives dessinent les contours d’un sujet cérébral clinique et expérimental qui est analysé ici sous l’angle de sa technicité et des procédures concrètes dont il dépend.
The electroencephalogram (EEG), invented by the German psychiatrist Hans Berger in 1924, reached the neurophysiological laboratories and several clinical contexts in the mid-30s. In Switzerland, some skeptical physiologists and enthusiastic psychiatrists paved the way for its integration, but it was only after the Second World War that an emerging field of epileptology became part of a process of technological and epistemological innovation which raised great expectations and produced a large body of research at the crossroads of physiology, neurology and psychiatry. An informal network was created, characterized by clinical, scientific and local institutional cultures. The EEG also made it possible to detect some clinical entities, not however without transforming them, as in the case of epilepsy. Some attempts to probe psychiatric diseases and subjects with the EEG are described as negotiated relationships between clinical observations, subjective manifestations or symptoms and inscriptions of a spontaneous or elicited electrical brain activity. These attempts shape a clinical and experimental cerebral subject, which is analyzed in this article from the point of view of its technical aspects and the concrete procedures on which it depends.