
Romantisme n° 154 (4/2011)
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L’analogie que certains linguistes établissent, dans la seconde moitié du XIXe siècle, entre vie des langues et évolution des espèces, ainsi que la reprise de ce modèle pour penser la concurrence des genres littéraires, ont exacerbé les craintes de voir la science et ses néologismes « monstres » éradiquer l’esprit et le discours poétiques.Or,malgré les nombreuses affirmations posant que les mots de la science ne devaient ni ne pouvaient trouver place dans les vers, la condamnation des périphrases employées dans la poésie scientifique de Delille montre que critiques et poètes, comme le public, font des termes savants qui se naturalisent peu à peu des mots propres, qu’on ne saurait éviter sans ridicule. On analyse donc les paradoxes d’un refus de la science qui conduit à prôner l’isolation de la poésie hors du milieu culturel qui l’accueille, tout en puisant à des modèles biologiques.
In the second half of the 19th century, linguists likened the history of languages to the evolution of species, a pattern also used as a model for the competition between literary genres. Those similes intensified the fear that science and its “monster” neologisms would eradicate the spirit and language of poetry. However, inspite of numerous texts stating that the words of science should and could not be put in verse, the rejection of the periphrasis used in Delille’s earlier scientific poetry shows that the critics and the poets of the time, just like the general public, did in fact consider many once specialized terms as proper terms, that one could hardly keep avoiding without being ridiculous. The essay hence analyzes the limits of a refusal of science that led to advocate a confinement of poetry, cutting it from its cultural environment, while deducting its models from life sciences.

