Annales historiques de la Révolution française n°390 (4/2017)
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Les reports de vente de grains sur les marchés, observés au XVIIIe siècle, et en particulier au moment de la Révolution, sont souvent assimilés, dans l’historiographie, mais aussi à l’époque, à des manoeuvres spéculatives de la part des grands exploitants agricoles aux seules fins d’accumulation capitalistique. Or, l’examen de la correspondance d’un couple de fermiers près de Lille, entre 1789 et 1791, montre qu’il peut s’agir de conséquences de contraintes techniques, inhérentes à la tenue d’une grande exploitation. Par ailleurs, lorsque la spéculation est attestée, il s’avère aussi qu’elle est rendue nécessaire pour maintenir la rentabilité de l’entreprise, et parfois limitée par un respect de l’économie morale et a fortiori par une volonté de préserver le « capital social » de ces mêmes fermiers.
The reports of grain sales at the markets, observed in the eighteenth century, and in particular at the time of the French Revolution, are often assimilated in the historiography, as well as at the time, with the speculative actions by large farmers whose sole aim was the accumulation of capital. But a close examination of the correspondence of these farmers near Lille between 1789 and 1791 shows that they could act in response to technical constraints inherent to the operation of a large production. Indeed, where speculation is clearly evident, it turns out to have been necessary to sustain the solvency of the enterprise, and was often tempered by a respect « economic morality » and notably by a desire to preserve the "social capital" of these same farmers.