Littérature n° 180 (4/2015)
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Il existe une parenté entre traduire et écrire : c’est qu’au fond de la langue, gît toujours une langue autre, à l’écoute de laquelle se tiennent écrivains et traducteurs. Pour les écrivains français, cette langue fut longtemps le latin. Mais cette situation a cessé au cours du XXe siècle où certains écrivains ont cherché ailleurs la matière de la nécessaire altérité. Après Valéry, c’est sans doute l’oral qui s’est substitué au latin. Mais une langue parlée qui sonne, dans certaines oeuvres, comme la transfiguration et la dépossession de notre usage courant. Écrire reviendrait donc à écouter parler en soi cette langue inconnue, ma seule langue, disait Derrida, et qui n’est pas la mienne.
There is a relation between translating and writing : it is because, deep down language, a different language always lies, a language which writers and translators listen to. For a long time, this language used to be Latin for French writers. But this situation stopped during the XXth century, when some writers seeked the material of the necessary otherness somewhere else. After Valéry, orality is probably what replaced Latin. But a spoken language that sounds, in some works, as the transfiguration and the dispossession of our current usage. Writing would thus amount to listening to this unknown language speak in oneself, the only language that is mine, Derrida used to say, and that isn’t mine.