Littérature n° 180 (4/2015)
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L’essor de la modernité a en bonne partie eu raison de la discursivité en poésie, sous prétexte que le discours logique et référentiel appartenait plutôt au domaine impur de la prose. Depuis plusieurs années, Jacques Réda passe outre ce parti pris, notamment dans La Physique amusante (2009) et Lettre au physicien (2012), deux recueils consacrés aux découvertes de la physique moderne. Le présent article tente de faire ressortir la valeur contrapuntique de la poésie didactique et scientifique ainsi mise à jour. Par l’intermédiaire de ces genres poétiques désuets, Réda rend hommage à une science aussi bouleversante qu’inspirante. Une intention parodique soustend toutefois les leçons développées au fil des poèmes. Réda pastiche les discours savants dans le but de se tourner lui-même en dérision. Il fait ainsi régner une légèreté et un humour capables de transmettre le plaisir qu’éprouve le physicien du dimanche lorsqu’il se mesure aux postulats les plus abstraits de la science. Sans raideur professorale, les poèmes sont portés par une imagination qui aide à vulgariser les théories physiques et à les transformer parfois en d’étonnantes fabulations. Il affleure alors sous le discours scientifique certaines des grandes préoccupations métaphysiques que la tradition poétique véhicule depuis l’Antiquité.
The blossoming of modernity has, fort most part, got the best of discursivity in poetry, on the pretext that logical and referential discourse rather pertained to the impure field of prose. For several years now, Jacques Réda has been disregarding this bias, particularly in La Physique amusante (2009) (Amusing physics) and Lettre au Physicien (2012) (Letter to the Physicist), two collections devoted to the discoveries of modern physics. This article tries to enhance the contrapuntal value of didactic and scientific poetry here brought to light. Through these quaint poetic genres, Réda pays homage to a science which is just as overwhelming as it is inspiring. However, a parodic intention underlies the lessons which are developed throughout the poems. Reda does a pastiche of scholarly discourses so as to make a mockery of himself. He thus imposes a lightness and a sense of humour that can convey the pleasure the Sunday physicist feels when he tackles the most abstract postulates of science. Without professorial rigidity, the poems are carried by an imagination which contributes to the popularization of the physical theories and sometimes to their transformation into amazing fantasies. Some of the great metaphysical concerns which poetical tradition has been conveying since Antiquity then surface beneath the scientific discourse.