Romantisme n° 139 (1/2008)
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Dans le dernier tiers du XIXe siècle, l’expansion coloniale en Afrique a produit une abondante littérature que les naturalistes et les symbolistes, généralement indifférents aux grands espaces, ont abandonnée aux feuilletonistes et à un public dit populaire. Portée par un positivisme souvent étroit, compromise avec des thèses racialistes aujourd’hui inadmissibles, évidemment peu soucieuse de l’épithète rare, cette littérature est tombée dans un relatif oubli dont il n’est pas sans intérêt, pourtant, de la tirer. Distincte à la fois du roman exotique à la Loti et du roman colonial postérieur à la guerre de 1914, elle se nourrit des récits d’exploration authentiques et des travaux de l’ethnographie naissante et en fictionnalise les matériaux en suivant les codes simplificateurs du roman d’aventures. Entre les deux pôles du « civilisé » et du « sauvage », elle met aux prises, dans une extrême violence, une variété considérable de héros et d’adversaires et passe l’avenir du processus colonial au banc d’essai de ses affabulations. Celles-ci dressent la cartographie idéologique de la fin du siècle et révèlent que l’imaginaire de la Décadence, qui ne s’est pas toujours confiné dans les chambres closes, continue, un grand siècle plus tard, de formater le nôtre.
During the last third of the 19th century, colonial expansion in Africa spawned a wealth of fiction which the Naturalists and Symbolists, largely indifferent to open tracts of space, left to the attention of hacks and popular consumption. Imbued with an often narrow positivism, compromised by racialist theories unacceptable today, manifestly little concerned with wellwrought language, this area of fiction has fallen into relative neglect, but it is not without interest to re-examine it. Distinct both from the Loti-style exotic novel and from the colonial novel which developed after World War I, it draws on authentic travel accounts and on protoethnographic writing, fictionalising the material according to the simplifying codes of adventure novels. Between the twin poles of the “civilised” and the “savage”, it engages in the violent confrontation of a wide range of heroes and adversaries, and uses the testing-ground of its narratives to review the future of the colonial process. The tales outline an ideological map of the fin de siècle and demonstrate that the Decadent imagination, which was not always confined within four walls, continues more than a century later to shape our own.