Romantisme n° 176 (2/2017)
Pour acheter ce numéro, contactez-nous
Recevez les numéros de l'année en cours et accédez à l'intégralité des articles en ligne.
La critique a souvent envisagé le libertin sadien de manière monolithique. Or, dès la galerie de portraits du prologue des 120 Journées de Sodome, de manière plus manifeste encore dans Juliette, et jusque dans les romans de Charenton, un effort apparaît pour singulariser les différents personnages de libertins dans les portraits, avec en particulier un jeu de comparaison et d’opposition entre eux qui apparaît comme une constante de l’écriture sadienne. Ce « jeu » de singularisation est limité, car Sade ne se soucie guère de réalisme psychologique et ne cherche pas à fabriquer des caractères. Ces oppositions peuvent même paraître factices et, mis en action, tous ces personnages semblent faire à peu près la même chose – le pire. L’oeuvre de Sade, alors même qu’elle se réalise presque entièrement dans les genres romanesques disponibles à son époque, semble dans cette perspective réfractaire à tout « roman ».
Literary criticism has often seen the Sadean libertine as a monolithic figure. And yet, from the portrait gallery in The 120 Days of Sodom, more clearly even in Juliette, and through to the Charenton novels, the effort to individualise the different libertine characters through their portraits manifests itself, in particular through a play of comparison and opposition between them that appears to be a constant of Sadean writing. This “play” of individualisation is limited, as Sade is not concerned with psychological realism and is not trying to create characters. The oppositions can even feel artificial and, once in action, all his characters do seem to be doing the same thing – the worst. Sade’s work, even as it almost exclusively takes on the shapes of the novelistic genres available to him in his time, thus seem from this perspective totally impervious to any “novel”.