À la fin de sa vie, Stéphane Mallarmé se consacre tout entier à la réalisation d’un « Livre » qui devait être son GrandOEuvre, à la fois littéraire et mystique. Habité du fantasme du livre-monde, le Poète aspire à la création d’un ouvrage capable d’être tous les livres à la fois. En vain : sa mort parachèvera l’inaccomplissement de ce projet. En 1957, Jacques Scherer publie pour la première fois les notes en vue du « Livre ». La dimension cosmologique de cette utopie esthétique inspire alors la théorie littéraire des années 1960-1970, et le « Livre » devient peu à peu un prototype cybernétique, un « paléo-ordinateur ». Cet article se propose de revenir sur ce moment cybernétique du « Livre » de Mallarmé afin de mieux cerner la manière dont il a été un jalon historique du tournant matériel de la littérature, et des bouleversements que ce dernier a induits quant à la poétique des textes.