Annales de Géographie n° 702-703 (2-3/2015)
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La conception de l’espace carcéral semble avoir toujours trahi, en France, une pensée spatialiste illusoire, qui ferait de la prison un lieu apte à surmonter les contradictions sociales. Cet article entend le démontrer en s’attachant aux fonctions attribuées à l’espace carcéral, à la fois par une approche diachronique, allant de l’invention de la prison pénale sous la Révolution jusqu’à la période contemporaine, et par une approche sensible au surinvestissement du dispositif spatial de l’enfermement carcéral et tout particulièrement sa dimension architecturale dans bien des discours officiels. L’espace est érigé en véritable actant de l’enfermement, support de délégation de la peine de prison, censé fournir la solution ultime à la déviance. La confiance sans cesse mise dans le dispositif carcéral, la croyance des Révolutionnaires et de tant de nos contemporains en un espace carcéral apte à punir, soigner, réinsérer, dissuader, ou la légitimation toujours affirmée de la prison comme solution terminale au problème de la déviance, soulignent un surinvestissement des capacités spatiales aux dépens du rôle essentiel des interactions sociales.
French conceptions of prison space have always relied on a spatialist way of thinking, as if prison could be a place able to overcome social contradictions. This paper highlights this through an analysis of the functions attributed to prison space. It follows a diachronic approach, from the invention of the prison as a penal place (and not just a detention house to await trial) during the French Revolution to the present day. The paper underscores the extent to which official discourses on prison constantly refer to the spatiality of the prison system, especially its architectural ethos. Space becomes an active factor of confinement, punishing inmates and supposedly offering the ultimate solution to social deviance. Both Revolutionaries and people of our time have believed that prison space could punish, cure, rehabilitate, and deter criminals. The prison system is constantly mobilized and legitimated as the definitive solution to deviance. The spatial dimension of the prison is clearly overemphasized and the decisive role of social interactions much too frequently forgotten.