Annales historiques de la Révolution française n° 373 (3/2013)
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Octobre 1792 : Toussaint Bonvoisin (1741-1815), un mercier ordinaire retiré dans une maison de la paroisse Notre-Dame (Le Havre), prend la plume. Horrifié par les massacres de Septembre, il commence à écrire un journal, Précis de la Révolution relativement à Louis 16. Respec du aux Rois et aux puissances, dans le but d’instruire ses enfants des méfaits de la subversion spirituelle provoquée par la Révolution. Ce journal long de plus de 4 000 pages, qu’il rédige de façon journalière durant un an, entre l’automne 1793 et la fermeture du Club des jacobins en novembre 1794, s’achève au début de 1803. L’étude de cet égo-document, dans lequel sont insérés plus de 200 journaux de la période révolutionnaire, le plus souvent issus de la presse royaliste rouennaise sous le Directoire, permet de voir avec prégnance le rôle que peut jouer la pratique d’une revue de presse dans les écrits des témoins de la crise révolutionnaire. Cette pratique, qui a été jusqu’à ce jour surtout analysée sous l’angle des pratiques collectives, y émerge comme un instrument utilisé pour contourner la difficulté d’écrire née de l’enchaînement de traumatismes entre l’automne 1793 et l’été 1794 et pour améliorer la pédagogie d’un récit dont l’objectif premier est d’ancrer le refus de la Révolution dans la mémoire familiale.
October 1792 : Toussaint Bonvoisin (1741-1815), an ordinary merchant living in retirement in a house of the parish of Notre Dame (Le Havre), takes up his pen. Horrified by the September Massacres, he began to write a journal, Précis de la Révolution relativement à Louis 16. Respec du aux Rois et aux puissances, intending to educate his children about the misdeeds caused by the spiritual subversion brought about by the Revolution. This journal containing more than 4,000 pages, written even day to day during one full year, between Autumn 1793 and the closing of the club of Jacobins in November 1794, stretched until the beginning of 1803. The study of this « ego-document », which contains, interlaced, more than 200 newspapers from the revolutionary period, most of them excerpts from the royalist press of Rouen under the Directory, highlights the importance of a critique of the press in the writings of witnesses of the Revolutionary crisis. This practice, until then largely analyzed from the point of view of collective practices, emerged as an instrument used to overcome the difficulty of writing, a condition born of the series of traumas sustained between the Autumn 1793 and the Summer 1794. Moreover, it improved the pedagogy of an account whose principal aim was to ancor the rejection of the Revolution in the family memory.