LITTÉRATURE Nº206 (2/2022)
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L’article propose de relire Passion simple et Se perdre à la lumière de Barthes. Pour dire la passion, Annie Ernaux est confrontée à un dilemme sis au coeur même du langage amoureux qui est à la fois trop et trop peu. Tentée par le plaisir sociologique de désillusionner, par une posture surplombante, elle voit son objet lui échapper car la distanciation signe une perte ; et ce qui se perd, c’est la part magique, romanesque de cette passion. Pour atteindre la vérité de cet emportement, il faut que deux modalités apparemment antagonistes s’entrechoquent dans l’écriture, que s’imbriquent Sade et Nous Deux, le sexuel et le sentimental,Vronski et le slip russe. De cette collision inattendue, l’auteure fait éclore un réel invisible à l’oeil nu, un romanesque du punctum, qui se niche dans le détail, dans une manière de découper le réel.
The article proposes, with Barthes, a re-reading of Simple Passion and Se perdre. In order to tell of passion, Annie Ernaux is confronted with a dilemma located at the very heart of the language of love, which is both too much and too little. Tempted by the sociological pleasure to disillusion, by an overlooking posture, she sees her object get away from her because distanciation signals a loss ; and what is lost is the magic, romantic share of this passion. To attain the truth of this passion two apparently antagonistic modalities have to jostle together in writing, Sade and Nous Deux, the sexual and the sentimental, Vronski and the Russian pair of pants, have to overlap. Out of this unexpected clash, the female writer kindles a real invisible to the naked eye, a romantic of the punctum, hidden in the detail, in a manner of cutting out the real.